Université Laval ; La lutte est loin d'être finie

Le Québec Étudiant
Volume 01 - Numéro 01
6 septembre 1977

Pour une université telle que Laval on peut considérer la lutte des prêts-bourses, suite au conflit du syndicat des professeurs envers leur employeur, comme étant historique. En effet depuis 1969 où il y avait eu occupation par une vingtaine d'étudiants du bureau du recteur dans la tour des sciences de l'éducation, aucune contestation d'envergure n'avait pris forme à Laval.

Cette année, Laval a vécu les conflits les plus intenses de son histoire. Le syndicat des professeurs nouvellement fermé (depuis 1975) entreprit une grève de quatre mois pour avoir une nouvelle convention collective. C'est à la suite de ce conflit qu'est né le problème des prêts-bourses ou plus singulièrement les difficultées financières des étudiants de poursuivre, à cause de revenus insuffisants, une année scolaire prolongée jusqu'au 8 juillet. Après le réaménagement des prêts-bourses apporté par le ministre de l'éducation, les étudiants commencèrent à réaliser les problèmes financiers qui s'annonçaient. Le Rep (regroupement des étudiants de premier cycle) évalua la situation pour ainsi décider d'établir un certain nombre de revendications.

Le ministère de l'éducation accepta deux des cinq revendications et ce, en partie. Tout d'abord, un prêt sans intérêt égal aux frais de scolarité, remboursable six mois après la fin des études ou au plus tard le ler novembre 1979 ; ensuite une indemnisation pour les étudiants-finissants consistant en un calcul de dix semaines de revenus supplémentaires additionnés au montant obtenu normalement. Au chapitre des revendications refusées on peut lire; gratuité scolaire pour tous à la deuxième session, indemnisation adéquate pour les pertes encourues cet automne (1976) et ne retenir aucun revenu d'emploi d'été compte tenu du peu d'emplois disponibles au 8 juillet.

«Discréditer les étudiants en les isolant, une vieille, mais efficace tactique d'isoler les étudiants par rapport à la population en tentant de faire croire à celle-ci que les étudiants d'université (considérés encore socialement privilégiés) sont irresponsables et cherchent à faire de l'argent sur le dos de la population». Jean Baillargeon, secrétaire général du Rep, définissait de cette façon la stratégie du gouvernement durant ce conflit. Le comité ad hoc sur les prêts-bourses (du Rep) écrit dans son rapport que lors de leur recherche, il s'est vite aperçu que le gouvernement, loin de perdre de l'argent avec le conflit de travail à Laval, en avait économisé et cela pour un montant approximatif de 13 millions. Les média de communication mettaient en évidence davantage la supposée non-représentativité du mouvement, plus particulièrement du Rep, plutôt que ses revendications. Pour le Rep, les représentants du gouvernement ont cherché à gagner du temps afin de voir si les étudiants maintiendraient leurs revendications et le boycottage des frais de scolarité et obliger les étudiants à faire l'objet de la preuve. Le Rep se reproche, d'autre part, d'avoir consacré trop d'énergie à l'administration de l'université et d'avoir délaissé les pressions sur le gouvernement.

Mentionnons la manoeuvre du conseil de l'université de tenir une inscription par la poste visant à abolir le principal moyen de pression ; le boycottage des frais de scolarité. En dernier lieu, l'injonction de la Cour Supérieure signifié au Rep, à sept étudiants qui occupaient diverses fonctions dans le regroupement et à toutes personnes qui en avaient connaissance. Cette dernière est une mesure qu'employa l'université pour expulser les étudiants du bureau du recteur, occupé depuis dix jours, également pour interdire aux étudiants la tenue de lignes de piquetage au Pavillon de la bibliothèque où sont situés les principaux bureaux de l'administration. L' injonction prendra fin le 15 septembre prochain. Au Rep on accueille l'injonction en déclarant qu'elle brime les droits collectifs de manifester son mécontentement face à une situation financière qui se dégradait de jour en jour.

Quant à la mobilisation, en moins de six semaines il y eut près de 30 assemblées, dont quatre assemblées générales. A la deuxième manifestation plus de 1,000 étudiants ont marché sur le parlement. Une moyenne de 1,500 à 2,000 personnes assistèrent aux trois premières assemblées générales.

A la fin forcée de la lutte le Rep lançait ce message: «Cet automne 77 les étudiants de Laval auront rendez-vous avec l'ensemble des étudiants de la province, pour lutter contre l'endettement, le régime inadéquat des prêts-bourses, le sous-emploi des étudiants et le chômage pour les finissants. Espérons que les étudiants de Laval seront au rendez-vous fort d'une expérience acquise durement».

P. Potvin

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